https://www.leparisien.fr/hauts-de-seine-92/60-personnes-squattent-un-immeuble-a-clamart-le-proprietaire-craint-la-catastrophe-10-09-2020-8382573.php

60 personnes squattent un immeuble à Clamart, le propriétaire craint la «catastrophe»

Par Simon Gourru, avec Valérie Mahaut

Le 10 septembre 2020 à 20h21

5-7 minutes

Des coups de marteaux résonnent dans cet ancien bâtiment commercial situé au 14, rue de Versailles, à Clamart (Hauts-de-Seine). Et si les riverains s’en plaignent, il ne s’agit pas d’un conflit de voisinage qui couve dans le quartier. C’est un chantier illégal qui est en cours, mené par une soixantaine de personnes issues de la communauté rom qui squattent cette bâtisse de 800 mètres carrés depuis la mi-août.

Michelle était en vacances quand l’un de ses voisins l’a prévenue. « C’était le dimanche 16 août, la chaîne qui bloquait la porte a été sciée, la porte enfoncée à coups de masse », rembobine celle qui habite la maison jouxtant l’immeuble en question. Les riverains assurent que six personnes sont alors entrées dans les locaux. Un habitant dira plus tard à la police avoir vu les intrus casser une vitre pour pénétrer dans le bâtiment dans la nuit du 15 au 16 août.

LIRE AUSSI > Sa maison de Montreuil squattée durant le confinement, Christian se retrouve sans logement

La police s’est déplacée ce dimanche de la mi-août. Certains habitants de la rue de Versailles croient savoir qu’elle n’a pas invité les nouveaux venus à quitter les lieux. « Il y avait une quarantaine de personnes. La police les a fait partir dans le calme », indique au contraire le parquet de Nanterre, qui suit l’affaire de près. Trois jours plus tard, les squatteurs étaient de retour. Et maintenant, ils sont installés.

« Ils étaient 40, aujourd’hui près de 60, quand est-ce que cela va s’arrêter ? » s’inquiète Thierry Prieur, président d’Alliance Sud, association de riverains, dont les membres ont déposé plusieurs mains courantes. « Ils ont des groupes électrogènes. Ce qui nous inquiète, c’est qu’ils s’installent, poursuit Thierry Prieur. Entre les odeurs des poubelles et les nuisances sonores, cela devient insupportable. »

« Je suis complètement dérouté »

Pour les forces de l’ordre, la difficulté principale a d’abord été de retrouver le propriétaire des lieux, après le décès en juin de la personne qui avait fait construire cet ancien atelier de confection de textile, dans les années 1960. La succession étant en cours, le bâtiment sous régime de l’indivision, il a fallu un peu de temps pour contacter le bon interlocuteur.

Le squat se situe dans un ancien bâtiment commercial au 14, rue de Versailles à Clamart (Hauts-de-Seine). LP/Simon Gourru

Pour l’intéressé, qui souhaite rester anonyme, c’est un peu le ciel qui lui est tombé sur la tête. L’homme est dépité. Déjà touché par la perte de son père, il doit désormais supporter de voir l’ancien commerce familial squatté.

Newsletter Hauts-de-Seine

Chaque matin, l’actualité de votre département vue par Le Parisien

Votre adresse mail est collectée par Le Parisien pour vous permettre de recevoir nos actualités et offres commerciales. En savoir plus

« Je suis complètement dérouté, c’est l’inconnu pour moi, souffle-t-il. On avait pourtant sécurisé l’entrée et ils y sont allés à la masse. Nous avons affaire à des gens qui ne respectent rien mais qui ont la loi avec eux. »

Car après plus de 48 heures d’occupation des lieux, les squatteurs sont légalement protégés d’une expulsion immédiate. « Si nous avions pu contacter le propriétaire dès le début, on n’en serait pas là », commente une source policière.

«Si un nouvel incendie se déclarait…»

Le propriétaire a donc adressé une plainte au parquet de Nanterre. Il lui faudra aussi saisir la justice civile pour que l’expulsion soit ordonnée. Mais d’ici là, tous redoutent le drame.

L’immeuble a déjà été touché par deux incendies, en 2018 et 2019. « La police m’a dit qu’une ligne haute tension passe au-dessus. Si un nouvel incendie se déclarait, ce serait la catastrophe », s’inquiète le propriétaire.

« C’est un bâtiment commercial, pas du tout équipé pour l’habitation », précise-t-on à la police municipale de Clamart, qui organise des visites chaque jour sur place. « Avec le groupe électrogène et les bouteilles de gaz pour faire la cuisine, on craint vraiment l’incident », reprend un agent de la police municipale.

Affairée à passer le balai dans la cour de l’ancien local commercial, une jeune femme enceinte réagit dans un français maladroit.

« La police vient ici tous les jours et on ne nous a jamais rien dit, se défend-elle, assurant être en France depuis un an. Je nettoie, on essaye de garder propre mais il n’y a pas assez de poubelles. »

Réfutant les accusations de nuisances sonores, elle assure qu’elle et sa communauté sont victimes de préjugés. Mais aucun commentaire sur ce qu’elle et les autres personnes, qui vivent désormais dans le bâtiment, comptent en faire.

Un marchand de sommeil serait à la manœuvre

Car au-delà de l’installation sauvage, du bruit et des nuisances olfactives, c’est ce que font les Roms dans ces locaux qui inquiètent tout le monde. « Ils seraient en train de cloisonner tout un étage, pour faire des sous-locations », s’alarme Michelle, la voisine.

« Ils montent des cloisons en bois pour faire des chambres », confirme-t-on à la police municipale, qui s’inquiète de la « prise en mains du squat par un marchand de sommeil ».

« Nous surveillons la situation tous les jours, indique le commissariat local. Nous pouvons agir sur les abords, l’ordre public, mais c’est tout. Tant que l’expulsion n’est pas ordonnée, nous serons là pour éviter que le camp ne grossisse trop. »

De son côté, la mairie assure être en recherche active de solutions. « Nous avons alerté la préfecture avec qui nous étudions toutes les possibilités juridiques pour mettre fin à cette situation intolérable. »